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Solitude : ses impacts sur la santé (et comment y remedier)

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La solitude constitue « l’un des plus grands problèmes de santé publique de notre époque », déclarait en octobre dernier la Première ministre britannique Theresa May alors qu’elle présentait une initiative d’ampleur sur le sujet. À quels risques expose-t-elle au juste, comment expliquer le phénomène et, surtout, comment tenter d'y remédier ?

Il semble de plus en plus évident que la qualité et la quantité de nos liens sociaux (avec nos familles, amis, collègues, voisins), associés au sentiment d’appartenance, ont un impact sur notre santé, non seulement psychologique, mais aussi physique. De plus en plus de recherches comparent d’ailleurs l’isolement social avec l’alcoolisme, le tabagisme ou encore l’obésité comme un facteur de risque de santé global. Certains chercheurs parlent même aujourd’hui de « sociogénétique » pour tenter d’expliquer par quels biais nos liens sociaux influencent l’expression de nos gènes.
Le lien et la coopération, nécessaires à la vie

Froid, prédateurs, mauvaise chasse, cueillette peu abondante… Fut un temps où l’isolement dans un univers hostile nous condamnait à une mort certaine. Et c’est par la coopération et l’entraide que notre espèce a pu survivre et évoluer. Est-ce la raison pour laquelle, aujourd’hui encore, le lien social imprime sa marque sur nos cerveaux et nos corps ?

Notre besoin de lien, d’amour et de soutien n’est nulle part bien sûr plus évident qu’aux extrémités de la vie, de la dépendance du petit enfant à la dépendance de la personne âgée. Pourtant, entre ces deux âges, et alors même que sont tellement valorisées l’autonomie et l’indépendance à l’âge adulte, il faut se faire une raison : la vitamine la plus importante de toutes semble demeurer la vitamine L (L pour Love).

Car sans le contact humain, peu importe ce qu’on mange, comment on dort ou comment on bouge, nous ne pouvons pas nous épanouir totalement. Cette dimension de l’humain est, d’après des études de plus en plus nombreuses, nécessaire au fonctionnement même de notre organisme, nos organes, nos tissus et nos cellules.
Solitude : quel impact sur la santé ?

Comment l’isolement a-t-il ces effets très négatifs sur la santé ? Sur le plan strictement physique, vivre seul ou avoir peu de liens sociaux constitue un stress pour notre organisme. En témoigne le fait que notre corps sécrète plus alors de deux hormones orientées vers l’action et la survie : le cortisol et l’adrénaline. Ces hormones augmentent notre fréquence cardiaque, dilatent nos pupilles et nos bronches, mettent certaines fonctions importantes en sous-régime (typiquement la digestion) et libèrent plus de sucres dans le sang afin de nous donner l’énergie nécessaire pour survivre.

Le problème c’est que lorsqu’on est sous stress permanent la solitude peut même aller jusqu’à provoquer une dysrégulation immunitaire et une inflammation chronique, deux problèmes de fond en cause dans diverses maladies dégénératives ou cardiovasculaires, la dépression, la démence et même le cancer. Des recherches suggèrent en outre qu’avec l’avancée en âge il est plus difficile de sortir de cette boucle infernale reliant stress chronique, production de cortisol et inflammation.

Le plus surprenant c’est que la solitude s’infiltre jusque dans nos chromosomes et nos gènes. Une étude de 2018 montre par exemple que les personnes les plus seules, si elles n’avaient pas ou plus la capacité de faire taire leur stress (leur système nerveux étant en surrégime), laissaient plus le champ libre à certains virus dormants comme le CMV et avaient des télomères plus courts que les personnes bien entourées. Les télomères, ce sont ces « capuchons » à l’extrémité de nos gènes protégeant notre ADN, notamment des maladies liées à l’âge.

Cet impact de la solitude sur la longueur des télomères n’est pas l’apanage des êtres humains et se retrouve chez d’autres animaux sociaux tels que le perroquet.

Dans une étude de 2007, Dr Steve Cole découvrait lui que l’expression génétique des globules blancs de personnes seules, par rapport aux personnes entourées, avait tendance à favoriser l’inflammation. Enfin, c’est dans le champ de la neurologie que la solitude semble marquer le plus la santé, comme on pouvait s’y attendre ; avec un impact assez clair non seulement sur la dépression mai également sur la mémoire et la dégénérescence cérébrale.

De tout ce qui précède on peut tirer la conclusion que notre besoin d’appartenance et de lien est un élément tellement fondamental de l’être humain qu’en en étant privé, nous ne pouvons tout simplement pas être en bonne santé.
Solitude : état des lieux

En France, une étude récente réalisée par la Fondation de France estime que 12 % de la population est en situation de grande solitude tandis qu’une personne sur trois est exposée à ce risque. Et contrairement à ce qu’on pourrait penser, cet isolement ne touche pas seulement les plus âgés, mais également certains jeunes, et notamment les 15-30 ans dont 6 % seraient en situation d’isolement.

Pourquoi est-ce que les français se sentent plus seuls que jamais ? Bien sûr, il y a les bouleversements historiques du couple, de la famille ou du monde du travail, qui font se multiplier les séparations, les pertes d’emplois ou les mobilités géographiques. Mais il y a aussi la désertification des campagnes, le recul des commerces de proximité et des services publics (postes, bibliothèques municipales), l’atomisation du travail qui demande de moins en moins d’interaction avec les autres… La liste est longue des modifications dans nos modes de vie qui nourrissent le sentiment de solitude. Elle l’est aussi au niveau de nos valeurs collectives, qui font la part belle à l’individualisme et à l’égoïsme comme vecteur légitime de réussite personnelle.

Internet est particulièrement néfaste de ce point de vue, puisqu’à l’apparente boulimie informationnelle et interactionnelle que nous propose ce médium répond parfois une vraie solitude : après tout, on communique à distance, parfois sans se voir, en tout cas sans se toucher. Nombreuses sont les personnes qui témoignent d’une « soif » de vraies relations physiques et sociales, au-delà des « likes », « hashtags » et « émoticons ». Est-ce surprenant quand, comme le rappelait encore récemment une étude, un simple toucher permettait d’atténuer la douleur et de synchroniser les rythmes cardiaques et les ondes cérébrales ?
Comment retisser du lien ?

Quand on regarde les « zones bleues », ces endroits où la population a une espérance de vie plus longue, où les taux de centenaires sont les plus élevés (Okinawa au Japon, l’île d’Ikaria en Grèce, la région de Barbagia en Sardaigne par exemple), on s’aperçoit qu’ils ont tous certains points en commun et notamment la place et l’importance de la famille, la sensation d’appartenance très forte à une communauté, une forme de tribu, qu’elle soit religieuse, associative ou autre.

Quelles sont alors les solutions au niveau public comme personnel ? Est-ce qu’il faut faire comme la Première ministre britannique, Theresa May qui a nommé une « ministre de la solitude », Tracey Crouch, afin de combattre cette menace que constitue la solitude ? L’idée du gouvernement britannique est de financer des organismes communautaires pour lancer des activités qui connectent les gens entre eux. Que les relations humaines deviennent – ou redeviennent - les premiers remèdes avant les médicaments pour traiter, par exemple, la maladie d’Alzheimer. Cela est certainement une très bonne idée, mais pourquoi ne pas, dans ce cas, agir également en amont sur les facteurs d’isolement croissant que constituent nos politiques du travail, du logement, de l’aménagement urbain, etc. ? Si la solitude est la grande épidémie du 21e siècle, c’est que nous avons nous-mêmes créé les conditions de son émergence.

À l’échelle individuelle, il y a déjà beaucoup de choses que l’on peut faire soi-même pour prévenir la solitude. Schématiquement, nous avons cinq grands réseaux de sociabilité : familial, amical, professionnel, voisinage et affinitaire. Pour avoir une idée claire de ses relations, je vous conseille vivement de faire une sorte d’audit de ces cinq réseaux, car c’est bien la qualité et non pas la quantité qui compte. Il est très important que les relations que vous avez soient authentiques, positives, et vous rechargent en énergie.

Peu importe en effet si vous avez beaucoup d’amis si nous ne pouvez pas compter sur eux ! Faites une « carte d’amitiés » afin d’évaluer et identifier les personnes qui comptent le plus pour vous. Et même si c’est une évidence, rappelons-le : faites en sorte d’entretenir ces amitiés par de la présence, du support, de l’attention. En un mot, soyez avec vos proches comme vous aimeriez être traité vous-même. Pour nourrir ces relations, identifiez les valeurs, les hobbies, les centres d’intérêt qui sont importants pour vous afin de cibler les personnes avec qui, dans votre entourage, vous pourriez établir des liens constructifs sur cette base.

Que faire si vous n’avez pas d’amis, très peu de famille et/ou des relations compliquées ou un travail isolant ? Il est par ailleurs établi qu’il est plus difficile, à mesure qu’on avance en âge, de construire de nouvelles relations et d’élargir son cercle de sociabilité. Mais nulle fatalité ici ! Provoquez les rencontres : inscrivez-vous à un cours de cuisine, de yoga, de randonnée, ou encore adhérez à une association locale. Personnellement, j’aime beaucoup le mouvement des incroyables comestibles qui est un mouvement participatif citoyen de biens communs.

Source alternative santé
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