France Inter, Notre Temps, Les Échos et bien d’autres. Tous ces médias ont relayé en avril dernier cette info : Novartis a mis au point une molécule de synthèse pour soigner l’arthrose. Oui, mais c’est oublier un peu vite une étude parue dans le même temps sur les propriétés de la chlorophylle.
0LNA043. C’est le délicat patronyme d’une molécule de synthèse mise au point par Novartis et qui défraie la chronique dans le traitement de l’arthrose. Ce dérivé de pro- téine humaine permettrait de régénérer le cartilage en stimulant les cellules du cartilage, les chondrocytes. En septembre 2021, le géant pharmaceutique suisse annonçait fièrement avoir reçu des gendarmes du médicament américains (FDA) l’accord pour une procédure accélérée pour le traitement de l’arthrose du genou. Un an et demi plus tard, en mars 2023 donc, toute la presse relaye une étude (pourtant datée de décembre 2022) sur les capacités régénérantes du LNA043. Dont acte.
Et la chlorophylle dans tout ça ?
Ce n’est pourtant pas faire justice à une autre étude, passée inaperçue. Publiée elle aussi en décembre 2022 et dans la même prestigieuse revue Nature, elle cible les chondrocytes du cartilage mais en valorisant le potentiel thérapeutique de végétaux – les thylakoïdes –, et une action différente, à savoir la stimulation dans le cartilage de la production d’ATP (adénosine triphosphate) et de NADPH (nicotinamide adénine dinucléotide phosphate) qui, pour faire simplement, fournissent et transportent l’énergie nécessaire au métabolisme pour son fonctionnement.
Le modèle énergétique
Le cartilage est donc constitué de cellules, les chondrocytes, qui synthétisent (comprenez : fabriquent) une matrice composée de collagène. On parle d’arthrose lorsque la fabrication de cette matrice est insuffisante, notamment par déficience de production d’ATP et de NADPH par les chondrocytes. Bien entendu, l’idée de complémenter l’organisme en ATP et NADPH a été creusée mais les effets secondaires étaient nombreux (mort cellulaire, fort taux de stress oxydant).In vitro…
Pour stimuler la production d’ATP et de NADPH par les chondrocytes, les chercheurs se sont tournés vers les thylakoïdes. Ces derniers, issus de la chlorophylle des plantes, sont un ensemble de membranes qui participent à la photosynthèse. Ici, l’étude portait sur l’action des thylakoïdes d’épinard. Réduits à l’état d’unité nanoscopique (milliardième de mètre), ces nanothylakoïdes ont été encapsulés dans une membrane de plasma issu d’un chondrocyte. Les ayant testés sur des échantillons de cartilages atteints d’arthrose, les chercheurs ont avéré que les nanothylakoïdes pénètrent le morceau de cartilage de manière uniforme après vingt-quatre heures, et ce jusque dans ses parties les plus internes. En les plaçant sous un éclairage spécifique (chlorophylle oblige), les chercheurs ont constaté que les chondrocytes pourvus de nanothylakoïdes ont eu une production d’ATP et de NADPH restaurée au niveau habituel et sans effets secondaires.… et in vivo
Ces résultats ont bien sûr incité les chercheurs à les éprouver in vivo, en l’occurrence chez la souris. Résultats confirmés. L’injection intra-articulaire de ces éléments et l’exposition consécutive à la lumière permettent de réduire la progression de l’arthrose chez ces souris, de diminuer les altérations morphologiques de leur articulation ainsi que leur douleur. Leurs genoux contiennent aussi plus de collagène, témoignant que les chondrocytes ont la capacité de fabriquer un collagène de qualité. De plus, la biosécurité du traitement a été confirmée. Après étude, les organes des souris n’ont présenté aucune lésion liée au traitement.
Références bibliographiques
N. Gerwin, C. Scotti, Ch. Halleux et al., dans Nature, décembre 2022.
P. Chen, X. Liu, C. Gu et al., dans Nature, décembre 2022.
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