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Un prince qui ne se trouvait pas charmant (du tout)… – Chapitre 1

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Il était une fois, dans un grand pays enchanté, un prince qui ne se trouvait pas charmant. Pas charmant du tout même.

Pourtant, ce prince avait tout pour être heureux.

Il était beau et habitait dans un des plus grands châteaux de tout le pays où étaient garées les voitures de collection royales. Il avait aussi le plus beau cheval blanc.

Bref, il régnait sur un joli royaume rempli de fleurs et de gens sympathiques. Mais il n’était pas très habile à l’épée et les autres princes aimaient bien se moquer de lui.

Non seulement ce prince ne se trouvait pas charmant, mais il était malheureux, très malheureux. Il lui semblait qu’il passait à côté de quelque chose de très important.

Et il sentait qu’il n’avait aucune prise sur sa vie…

Il broyait du noir en se disant que rien ne semblait avoir d’importance à ses yeux. Quoiqu’il fît, il le faisait sans goût et ne savait pas, finalement, pourquoi il faisait ce qu’il faisait.

Notre prince avait pourtant des journées bien remplies.

Chaque jour, il faisait tout ce qu’un prince était supposé faire.

Il travaillait à l’administration de l’État, il prenait des décisions « très » importantes, il se pratiquait à l’épée, lisait des poèmes et participait à de somptueux banquets.

On aurait pu dire, donc, qu’il était très occupé. Malheureusement, ses occupations – et même sa vie entière – lui semblaient sans goût, sans signification.

Il avait l’impression qu’il gaspillait chaque jour qui passait.

Un soir, avant de se coucher, il prit un parchemin, une grande plume de paon et écrivit d’un seul trait tout ce qui semblait clocher dans sa vie:

« Je ne sais pas ce que j’aime ni ce que je veux. Je me crois incapable d’accomplir quoi que ce soit de vraiment satisfaisant. Je me sens prisonnier de ma vie et j’ai peur de me tromper si je prends de nouvelles initiatives. J’ai envie d’apporter une différence positive dans le monde et dans la vie des autres et j’ai l’impression de ne rien faire. Mais je n’ai envie de rien, c’est comme si j’errais sans but. Même si tout va bien, j’ai l’impression de ne pas vivre la vie que j’aimerais vraiment vivre. Ma vie n’a pas de saveur même si je fais tout ce que les autres me demandent. »

Après avoir couché ses réflexions sur le parchemin, il s’endormit d’un sommeil sans rêve, un sommeil qui ressemblait à sa vie, elle aussi sans rêve…

* * *

Les choses allaient de mal en pis pour le prince.

Non seulement il ne se trouvait pas charmant mais il avait de moins en moins envie de continuer à vivre. À vivre ainsi du moins…

Et surtout, il avait peur. Il avait peur d’entreprendre de nouvelles activités, de faire de nouvelles expériences.

Il avait peur de se tromper et de ressentir la douleur cuisante de l’échec, comme quand il était petit et que les autres lui disaient qu’il devait toujours réussir… et qu’il échouait.

Par un bel après-midi, le prince décida d’interrompre ses activités habituelles qui, décidément, le lassaient.

Il sortit pour faire une petite promenade dans la forêt aux abords du château, n’emportant que sa peine avec lui.

De longues heures passèrent que le prince employa à nourrir soigneusement le mouron qui grignotait un peu plus chaque jour sa joie de vivre.

La lumière du soleil commençait à décroître et le prince se dit à regret qu’il valait mieux rentrer.

Au détour d’un sentier, il vit un petit étang couvert de nénuphars. Il longea cet étang pendant quelques secondes de son pas traînant quand une voix tout près de lui, à la hauteur de l’eau, le fit sursauter:

– Par chance que je ne suis pas un vendeur de cordes !

– Plaît-il ? répondit le prince, mal assuré et surpris que de telles paroles s’élèvent de nulle part.

Un petit crapaud verdâtre et boutonneux était allongé confortablement sur une fleur de nénuphar. Il mordillait nonchalamment une brindille et arborait un sourire enjoué.

– Avec la tête d’enterrement que tu fais, tu m’en aurais bien acheté une pour aller te pendre au premier arbre venu, reprit l’amphibien.

– Je ne savais pas que les crapauds parlaient ! s’exclama le prince. Depuis quand les crapauds parlent-ils ?

– Et moi je ne savais pas que les princes pouvaient être si malheureux ! rétorqua le crapaud. Bien sûr que je parle, comme les oiseaux, les moutons et les pommes de terre ! Oublierais-tu que nous habitons un pays enchanté ?

– Ah, oui. Évidemment. J’avais fini par oublier ces merveilles à force d’être malheureux…

Le crapaud lui adressa un regard étonné et reprit:

– D’après les contes, ce sont habituellement les crapauds qui veulent devenir des princes. Mais avec l’expression désespérée que tu arbores, je ne voudrais pas être à ta place !

– Comment t’appelles-tu ? lui demanda le prince.

– Les gens qui manquent d’imagination me nomment Crapaud, mais certaines personnes plus éclairées m’ont donné le doux sobriquet de Sage.

– Tu es donc un sage ? questionna le prince.

– Si on veut. Mais je ne fais pas que réfléchir et philosopher sur la vie. Je suis aussi ténor dans la chorale de l’étang. Tu peux m’entendre tous les soirs à guichet fermé. Je prends aussi des cours de tango, j’étudie l’astrophysique et mon dernier roman a failli gagner le Goncourt. Et je parle cinq langues, mais avec un léger accent.

– Olala ! s’écria le prince, quelle feuille de route impressionnante ! Et comment fais-tu tout ça ?

– Comment je fais ce que je fais ? En voilà une question ! Je le fais, c’est tout.

– Comme tu as de la chance, lui répondit le prince. J’aimerais bien faire comme toi, me sentir bien dans ma peau et trouver un sens à ma vie. Veux-tu m’apprendre à regagner la confiance en moi ?

– Sache, jeune homme, que la confiance ne s’enseigne pas, pas plus que la bicyclette. Un bien curieux appareil d’ailleurs. J’aurais beau t’en décrire tous les détails, te donner la marche à suivre avec précision, te dire quand commencer à pédaler, tu tomberais quand même les premières fois. La confiance et la passion ne s’apprennent qu’à travers les nouvelles expériences dont tu peux gratifier ton quotidien. Je ne peux pas t’enseigner à aimer ta vie ni à t’aimer toi-même. La seule manière d’y parvenir consiste à entreprendre toi-même ce grand voyage.

– Mais je ne m’en sens pas le courage… dit le prince, sur un ton plaintif.

– Crois-tu que les adultes comme toi marcheraient si les bébés arrêtaient d’essayer dès qu’ils tombent la première fois qu’ils essaient ? La plus grande responsabilité de ta vie dépend de ta décision à faire ce que tu peux pour être heureux. Tu dois te concentrer sur ce que tu peux améliorer.

Puis, adoptant le ton du défi, le crapaud dit au prince:

– Si tu veux que je t’aide, tu dois d’abord répondre correctement à mon énigme. Qu’est-ce qui vole le plus vite, un chien ou un chat ? (Précisons que, dans ce pays enchanté, les chiens et les chats, en plus de parler, peuvent voler.)

Le prince fronça un sourcil, puis l’autre, et répondit:

– Ça dépend si le chien poursuit le chat. Dans ce cas, je souhaite au chat de voler plus vite !

Avec le sourire satisfait du professeur fier de son élève, le crapaud lui dit finalement:

– Tu es malheureux mais tu as de la créativité, et tu sembles avoir envie d’apprendre. Ça me plaît ! Et il y a un moment que je n’ai pas voyagé dans ce grand pays enchanté. Installe-moi dans ta couronne et je tâcherai de t’aider à trouver ce qui cloche dans ta vie. Ça m’aidera aussi à faire de nouvelles découvertes. Tu seras mon « Apprenti Sage ».

Ravi, le prince cueillit doucement le petit crapaud sur la fleur du nénuphar et l’installa confortablement à l’intérieur de sa couronne. Puis, les deux compères reprirent le chemin du château.

Pour la première fois, le prince marchait d’un pas alerte. Il avait décidé qu’il tenterait d’améliorer sa vie grâce à l’aide que lui prodiguerait le crapaud.
Source nicolas sarrasin
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