’ai effacé et recommencé ce texte plusieurs fois, suite à mon premier billet, j’avais le désir d’écrire un récit de voyage, mais pour relater quoi exactement? Je n’étais plus certaine de savoir ce qui était pertinent et si finalement ça l’était tout simplement. On est bombardé de récits, d’expériences et de témoignages les plus merveilleux les uns que les autres. Faire rêver et romancer c’est facile, mais partager la réalité, c’est plus ardu. Les longs voyages sont une multitude de moments et d’expériences intenses collées les uns à la suite des autres, des beaux et des moins glorieux. Et puis, aisément, on raconte ce qui est magnifique, parce que c’est plus facile et intéressant, mais la réelle perception est parfois un peu faussée.
Derrière chaque photo se cachent des petits bouts de vie qui ne peuvent être révélés, ce qui s’est réellement déroulé avant cette seconde où tout est paradisiaque, ce qui a suivi après. Il y a le trajet pour s’y rendre et le retour, sans oublier les efforts de vie pour être à cet endroit précisément. Derrière tous ces récits, ces statuts spontanés se cachent des vérités, pas toujours douces et roses. Et humblement, je ne sais trop comment raconter l’expérience que l’on vit en étant honnête jusqu’au bout.
Déjà un bon moment qu’on voyage, qu’on a quitté nos repères, qu’on vit l’extraordinaire, dans le sens, hors du commun. Vivre hors du quotidien ça vient chercher une autre facette de toi et de ceux qui t’accompagnent. Tu découvres l’autre, ses sourires, ses moments de joie et tu vis aussi ses déceptions et ses tristesses. C’est une vie familiale 24 heures sur 24, une proximité inhabituelle, on doit s’apprivoiser et s’accommoder. Il y a aussi l’improvisation, l’adrénaline de vouloir faire les bons choix. On doit assumer que tout ne peut être organisé et qu’il y a un tas d’imprévus assez déplaisant. Jamais je n’aurais pensé avoir des ennuis avec l’eau potable, avoir à organiser des réserves d’eau, faire une croix sur ma douche du soir après une journée de chaleur suffocante. Il y a eu aussi ces nuits où le vent s’agitait tellement que la peur a accompagné mes insomnies. Toutes ces questions que tu dois prendre à deux, et laissez-moi vous dire qu’il y en a un tas. Ces instants où tu souhaites la solitude ou la présence d’amis qui te sont chers. Tous ces moments, ces petits détails, ils sont difficiles à partager virtuellement sans tomber dans le drame, mais ils existent même au paradis.
Pour être franche, je vis ce que je désirais vivre, et c’est encore plus beau et plus intense que je l’avais imaginé. Je pense fondamentalement que pour être sain d’esprit c’est indispensable de sortir du quotidien et d’aller découvrir le monde, remettre les pendules à l’heure, remettre l’essentiel à l’avant-plan, se ressourcer. Je me sens choyé par la vie que j’ai choisi, une motivation perdue est finalement réapparue. Je retrouve une profondeur que j’avais oubliée, l’envie de vivre pour ma famille et moi. Je souhaite ardemment que ces émotions m’habitent encore au retour. Voyager est un grand remède pour plusieurs maux, surtout ceux du coeur et de l’esprit.
Pour rien au monde, je ne voudrais être ailleurs qu’ici. Je désirais, malgré toutes ces belles choses que je veux partager, ajouter une perspective réelle. Il est facile de faire l’envie si la réalité n’est pas étalée, tout ne convient pas à tout le monde. Que ce soit par inspiration ou par admiration, je porte dans mon coeur ces gens qui m’ont inspiré et qui m’inspirent encore, et grâce à elles, je suis ici aujourd’hui. Avoir cette humilité d’accepter qu’on ait besoin des expériences des autres pour accomplir ses projets de vie, j’aime penser que c’est le but du partage.
Ce que nous regardons l’instant d’une seconde sur tous ces écrans, ce n’est pas la vie, c’est l’instant d’une seconde, ne pas se laisser étourdir par cette vie virtuelle, peut-être seulement s’en inspirer pour faire de notre vie réelle un bonheur qui reflète nos propres désirs.
Lucia Sapio
Source muvirtualyoga
